Visualiser votre prochaine présentation face à un public génère immédiatement un stress ? Vous avez bien essayé la relaxation en Savasana pour faire le vide, mais dès que l’image de votre performance pointe le bout de son nez, vos mains sont moites, vous êtes tendu·e, votre rythme cardiaque s’accélère… bref, c’est l’angoisse. Et si la clé n’était qu’une question de posture ?

Quand la bonne posture n’est pas forcément celle que l’on croit…

Mise en situation : avant un événement à fort enjeu

Dans quelques heures, vous devrez faire une présentation orale dont l’enjeu est majeur, face à une audience exigeante. Votre discours est fin prêt, vous savez qu’il est pertinent. Pourtant, vous sentez un stress s’installer. Le moment vous semble approprié pour visualiser mentalement votre performance, afin de vous y préparer de façon optimale.

Vous vous allongez, détendu·e… mais vous ne parvenez pas à vous imaginer en train de faire votre discours. Tout est flou, confus. Si vous n’arrivez pas à vous projeter ne serait-ce que mentalement sur cette performance, vous craignez de ne pouvoir être efficace le moment venu. La panique monte et vous en venez à douter de vos capacités…

Lorsque les signaux proprioceptifs sont contradictoires

Ce qui se passe lorsque vous êtes allongé·e et que vous essayez de vous figurer en train de faire votre présentation face à un public, c’est que votre corps envoie à votre esprit des signaux contradictoires avec ce que celui-ci essaye d’imaginer. Vous souhaitez simuler mentalement une prise de parole en public dans laquelle vous êtes debout… alors même qu’en réalité vous êtes allongé·e sur votre lit.

Votre cerveau, perplexe.

Certains travaux ont ainsi montré que le fait d’adopter une posture incompatible avec le mouvement que l’on imagine peut complexifier notre capacité à le faire efficacement. L’explication est simple : nous prenons en considération les signaux que nous envoie notre corps, notamment les informations proprioceptives

Notre système nerveux est en effet très sensible à ces informations qui viennent des os, des articulations, des muscles et de l’oreille interne. Le fait de rendre ces signaux incompatibles avec ce que l’on veut imaginer pose une difficulté supplémentaire à notre cerveau. Cela génère une sorte de conflit entre ce que l’on vit au moment présent et ce que l’on projette mentalement.

La posture : un atout pour l’imagerie mentale, et pas que

À l’inverse, le fait d’adopter une posture compatible avec le mouvement que l’on imagine peut faciliter notre capacité à exécuter ce mouvement de façon performante. Une étude[1] menée en 2004 a ainsi analysé l’impact sur notre cerveau (et notamment sur l’excitabilité corticospinale[2]), des postures dites congruentes ou incongruentes avec un mouvement imaginé.

Les participants de l’étude avaient pour consigne de s’imaginer un mouvement d’opposition du pouce et de l’auriculaire. Cet exercice d’imagerie mentale se réalisait dans deux conditions expérimentales différentes : l’une congruente, dans laquelle les participants adoptaient une posture manuelle compatible avec le mouvement à imaginer ; et l’autre incongruente, où la posture était incompatible avec le mouvement à imaginer.

Les résultats ont montré que l’activité neuronale du cortex moteur était beaucoup plus élevée lors de la position congruente, et que l’excitabilité corticospinale était également plus importante :

Ces résultats confirment que le caractère compatible de la posture que l’on adopte influence positivement notre capacité à imaginer un mouvement, alors qu’une posture incompatible est un obstacle qui complexifie le travail mental. Vous ne vous faites donc pas d’idées : s’imaginer en train de mener une présentation en public alors qu’on est allongé est bel et bien laborieux, et c’est observable sur le plan neurophysiologique !

La bonne posture, une affaire de contexte

Lorsque vous souhaitez imaginer un mouvement ou une performance, il est donc recommandé d’adopter une position compatible : pour une réunion ou une prise de parole en public, on préfèrera faire ce travail de projection mentale en position debout (ou assise, a minima). En même temps que l’on établit une cohérence entre le corps (la posture) et l’esprit (qui est en train d’imaginer), on rétablit une connexion entre ce que l’on projette dans le futur et le moment présent.

La détente et la relaxation ont elles aussi des bénéfices à apporter : elles peuvent par exemple permettre une meilleure régulation émotionnelle. Et si vous souhaitez vous représenter mentalement votre prochain vol en avion, adopter une posture assise et détendue sera par exemple tout à fait avisé 😉

Un empowerment concret au-delà de la pensée positive

Se représenter mentalement une situation ou une action commence donc par adopter la posture adéquate. C’est elle qui nous met dans de bonnes dispositions pour imaginer puis exécuter une action, en favorisant une meilleure connexion entre notre corps et notre esprit.

Plus encore, en adoptant la bonne posture, nous augmentons notre confiance en nos capacités : pour que notre cerveau soit convaincu que nous sommes apte à exécuter une action, il faut que notre corps soit convaincant.  

Il ne s’agit pas là d’adopter des postures congruentes pour leurrer notre esprit… mais pour lui donner des indices concrets et authentiques sur notre capacité à exécuter une tâche ou un mouvement. Ce faisant, nous montrons à notre cerveau que notre corps et notre énergie sont prêts et aptes à être mobilisés.

 

La prochaine fois que vous vous préparez pour une présentation et que le stress commence à pointer le bout de son nez, souvenez-vous de commencer par le commencement : choisir une posture adaptée à ce que vous vous apprêtez à visualiser (pour une prise de parole en public, on évite donc le Savasana… 😏). Vous réduirez votre anxiété, tout en boostant votre confiance en vos capacités. Ainsi équipé·e, vous serez prêt·e à relever le défi qui s’offre à vous, avec calme et assurance !

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Référence :
Vargas, C. D., Olivier, E., Craighero, L., Fadiga, L., Duhamel, J. R., & Sirigu, A. , The influence of hand posture on corticospinal excitability during motor imagery: a transcranial magnetic stimulation study. Cerebral, 14(11), 1200–1206, 2004. https://doi.org/10.1093/cercor/bhh080

[1] Vargas, C. D., Olivier, E., Craighero, L., Fadiga, L., Duhamel, J. R., & Sirigu, A. , The influence of hand posture on corticospinal excitability during motor imagery: a transcranial magnetic stimulation study. Cerebral, 14(11), 1200–1206, 2004.
[2] Le tractus corticospinal est la partie de notre cerveau qui permet le contrôle volontaire des muscles. L’excitabilité corticospinale permet de rendre compte de l’activité des neurones du cortex moteur et de l’amplitude des potentiels moteurs évoqués qui en résultent et que l’on peut enregistrer au niveau des muscles correspondants.
[3] Carney, D. R., Cuddy, A. J. C., & Yap, A. J. (2010). Power Posing: Brief Nonverbal Displays Affect Neuroendocrine Levels and Risk Tolerance. Psychological Science, 21(10), 1363-1368.